Tout le monde s’accorde aujourd’hui, enfin, autour de la stratégie de la FFA sur la base du constat fait il y de nombreuses années et ignoré par beaucoup, concernant le manque d’interprètes en Langue des Signes Française (raison partielle de l’échec des Centre-Relais des conversations Téléphoniques).

Lorsque la FFA prend connaissance de l’article de Média’Pi du 13 avril 2023 et de l’article publié le 21 avril par Yanous avec une interview de la FNSF, elle constate des informations qui ne correspondent pas à la réalité.

Concernant l’article publié par Média’Pi sous la plume de Mme Estelle Arnoux le 13 avril 2023, la FFA souhaite préciser :

  • En premier lieu qu’elle n’a jamais eu d’entrevue avec Média’Pi, seules quelques questions écrites ont été adressées par Média’Pi à la FFA auxquelles cette dernière a répondu par écrit sans pour autant que les réponses précises à ces questions précises ne soient publiées par Media’Pi…
  • En second lieu, qu’aucune sollicitation n’a été faite par les signataires de la lettre ouverte du 26 janvier 2023, pas plus que par Media’Pi, à la FFA pour que cette dernière présente son projet de plan métiers détaillé.
  • La FFA n’est en aucun cas un centre relais téléphonique (CRT), c’est une fédération professionnelle. Les opérateurs de téléphonie ont, effectivement, quant à eux une activité exclusivement de CRT
  • Dans ses réponses aux questions de Media’Pi, la FFA n’a en aucun cas indiqué être à l’origine d’un abaissement du niveau d’études des interprètes. Elle a précisé que ses membres (concernés par ce sujet) étaient à l’initiative de la rédaction d’un plan métiers dont le volet interprètes en langue des signes française visait à combler et renforcer le cursus existant en créant un niveau intermédiaire (licence) inexistant aujourd’hui entre le bac et le master et en redéfinissant le contenu du master. De fait, à l’issue de cette future licence, la formation des étudiants sera d’un niveau équivalent sinon supérieur à celui du master existant. De plus, elle prendra en compte une formation à la visio-interprétation comme une réelle composante du programme, formation qui bénéficiera au CRT ainsi qu’aux autres acteurs du marché (aujourd’hui les masters proposent entre 3 heures et 3 jours de formation à la visio-interprétation en fonction des universités alors qu’il s’agit d’une activité essentielle en volume et besoins et nécessite une expertise particulière). De surcroît, cette licence sera sur 3 ans avec plusieurs milliers d’heures de formation contre 2 ans avec quelques centaines d’heures pour le master existant. De facto, le futur master verra des étudiants formés sur cinq ans contre deux ans aujourd’hui. Ainsi, en aucun cas, il ne peut s’agir d’un abaissement du niveau d’études des interprètes et encore moins d’un abaissement du niveau de formation.
    Il est à noter que la FFA a pris cette initiative car cela relève de sa responsabilité, comme pour toute fédération professionnelle, du fait que le cursus existant n’est pas satisfaisant pour les employeurs tant pour leurs exigences que pour celles des sourds qui l’expriment d’ailleurs depuis longtemps. Pour finir, la FFA soutient le maintien du master pour le métier d’interprète (en langue des signes notamment) alors qu’il pouvait possiblement être réinterrogé du fait de sa non-concordance avec les responsabilités attachées à ce niveau de diplôme.
  • Concernant l’affirmation figurant dans l’article selon laquelle certains pays auraient abaissé le niveau d’études exigé pour les interprètes en langue des signes, d’une part, à la connaissance de la FFA, aucun pays n’a procédé à cette dégradation et, d’autre part, comme pour toute affirmation crédible elle ne peut l’être que si elle est documentée et sourcée, ce qui n’est pas le cas. Concernant le cas particulier de la France les propositions faites par la FFA visent bien à relever un niveau en dégradation constante depuis de nombreuses années et corriger une décision prise il y a 30 ans de former nos interprètes en langue des signes au niveau master exclusivement alors qu’aucun de nos voisins européens n’a fait ce choix.
  • Au sujet de l’inaction des principaux intéressés, on relève des affirmations d’actions non documentées. Depuis 2010 (plan surdité) puis 2016 (loi pour une République numérique), soit depuis 13 ans, le constat est le même alors que la loi en 2016 permettait par son volet plan métier une évolution. Au lieu de se consacrer à l’indispensable sujet de la formation, certains ont préféré une action visant à imposer une obligation de diplôme de niveau master pour des appels simples et rapides du quotidien (passer commande de produits de restauration rapide, etc.) alors que des secteurs très sensibles comme la justice (affaire Descamps ou encore l’affaire Quentin Vasseur) ou la santé sont restés sans obligation de diplôme avec les conséquences possiblement dramatiques en découlant.

De même, la mission de préfiguration qui a émis un rapport, soutenu par les principaux intéressés cités, ne propose rien de concret quant à un plan métiers alors que ce sujet était bien entendu l’élément essentiel de la réflexion à mener par ladite mission pour que la loi puisse enfin s’appliquer efficacement au profit des bénéficiaires comme le législateur le souhaitait. Sans ressources humaines adaptées quelle efficacité attendre, quel que soit le dispositif, universel ou non ? La question est donc quel était l’objectif réel visé par les rédacteurs de ce rapport ? La France est ainsi 29ème au classement des pays européens en nombre d’interprètes en langue des signes par habitant et elle en dispose de 5 fois moins que les Etats-Unis (toujours ramené en nombre d’interprètes par habitant)!

Le constat est très simple, nos concitoyens sourds et malentendants font partie des citoyens européens ayant l’accès le plus limité à leur société. En conséquence, tout éventuel nouveau dispositif (ou structure dite universelle) et tout simplement la bonne et complète application de la loi de 2016 sont inenvisageables dans ce contexte. Les résultats obtenus depuis l’application de la loi avec 1h par mois accordé à chaque bénéficiaire sont sans appels. Le passage à 3h par mois a bien entendu détérioré la situation. Il est évident que les obligations applicables en 2026 de 5h par mois en 24/7 ne peuvent être maintenues si ce n’est pour les seuls modes de communication autres que la langue des signes.

L’inaction évoquée ci-avant est constatée également pour les besoins scolaires puisque 130 enfants ont été impactés par une rentrée scolaire sans ressources humaines adaptées cette année. Des étudiants en université ont publié via la FNSF un appel à l’aide face à la pénurie d’interprètes pour suivre leurs cours. C’est pourquoi le plan métier de la FFA, et en particulier son volet licence, est destiné aussi à alimenter différentes filières en souffrance autres que celle de l’interprétariat.

Autre point, comme évoqué plus haut, les affirmations voire interrogations, se doivent d’être documentées et sourcées, il est ainsi tout à fait inapproprié d’évoquer la FFA, sa composition et son fonctionnement, comme le fait Mme Thomas, coprésidente de l’Association française des interprètes et traducteurs en langue des signes (AFILS), sans disposer d’informations factuelles. La FFA est une fédération professionnelle, comme celle du bâtiment, de la chimie,… elle est donc composée d’adhérents, qui ne peuvent être par nature que des acteurs économiques. La FFA, à ce titre, n’a donc pas vocation à se substituer à d’autres types d’associations dont l’objet est de regrouper différents profils comme le suggère Mme Thomas. La FFA est articulée autour de différents groupes de travail, dont le groupe métiers, qui se doit de définir les besoins de la profession, comme pour toute autre fédération professionnelle, et de mettre en place les formations nécessaires. Ce groupe métiers est composé d’experts du sujet traité, collaborateurs des membres de la FFA, et dans le cas présent d’universitaires, de professionnels experts, de diplômés membres ou non d’associations d’interprètes et de professionnels sourds.

  • La FFA consulte pour alimenter ses travaux différentes parties prenantes concernées, en France comme à l’international, et elle est disposée à présenter ses propositions comme d’ailleurs elle le fait et le propose depuis un an et notamment si elle est sollicitée. Concernant les acteurs économiques qui ont fait le choix de ne pas être membres de la FFA, ils ne peuvent être inscrits dans les réflexions menées par la FFA mais bénéficieront de tout le travail réalisé par la FFA.

Pour conclure, la FFA s’interroge sur les différentes prises de position des principaux intéressés cités et notamment des rédacteurs de la lettre ouverte. En effet, à aucun moment ils ne proposent un bilan général du CRT opéré par les opérateurs de téléphonie qui mettrait en évidence deux succès et un insuccès, les chiffres publiés par l’ARCEP pour autant documentent et matérialisent parfaitement le propos. Ils ne font pas plus état des raisons de cet insuccès qui pour autant également sont tout à fait identifiées et sont de deux ordres. Le premier est en effet le nombre d’interprètes formés, le second, essentiel, est l’absence d’appétence des interprètes diplômés d’un master qui aspirent bien entendu à exercer leur métier à un autre niveau que celui consistant à relayer des appels téléphoniques pour passer des commandes auprès de fournisseurs de restauration rapide par exemple. Situation qu’a bien compris et pris en compte la FFA dans ses réflexions sur le plan métiers. Les membres de la FFA contrôlent parfaitement dans leurs organisations respectives la distribution des besoins en fonction du niveau de compétence nécessaire et disposent de procédures d’escalade permettant de solliciter des compétences adaptées dans les situations qui par leur évolution le nécessitent. 

Ainsi l’interrogation utilisée dans son titre par Media’Pi « Baisser le niveau d’études des interprètes ? Les réponses de la FFA et de Rogervoice » n’a aucun fondement si ce n’est de communication, à l’initiative et dans l’intérêt de qui ?

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